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Eduardo Berti

Eduardo Berti est né à Buenos Aires en 1964. Il a publié en France Le Désordre électrique (Grasset, 1999), Madame Wake-field (Grasset, 2001 ; Babel, n° 789), et chez Actes Sud : La Vie impossible (2003), Tous les Funes (2005), et Rétrospective de Bernabé Lofeudo (2007).

Très jeune, il collabore dans les journaux les plus importants de son pays (Página 12, Clarín, La Nación), il est le fondateur de l’une des premières radios indépendantes d’Argentine et il publie deux livres journalistiques autour de la musique populaire en Amérique Latine. Il vient de créer la maison d’édition : Editorial La Compañía.

Dans les années 90, en parallèle à la réalisation de documentaires pour la télévision sur l’histoire du tango, il travaille aussi comme critique littéraire, traducteur et lecteur.


Par larouge • Berti Eduardo • Jeudi 14/06/2012 • 0 commentaires  • Lu 2785 fois • Version imprimable

les fictions les plus courtes du monde

les fictions les plus courtes du monde

de eduado berti



 
broché

editions cataplum

 


Cette anthologie propose une approche historique du genre microfictionnel, cela pour démontrer au public français que la littérature de forme brève a toujours séduit les plus grands auteurs de tout temps et de toute culture.
Donner ainsi, à lire ou à relire, des microfictions d'Esope, Platon, Voltaire, Oscar Wilde, Mark Twain, Franz Kafka... Et découvrir de magnifiques textes d'auteurs orientaux ou slaves injustement méconnus en France.



Le Repentant

Un homme rencontre un gamin en pleurs :
- Pourquoi pleures-tu ? lui demande-t-il.
- Je pleure parce que j'ai péché.
- Tu dois te sentir bien désoeuvré pour te livrer à une telle occupation.
Le lendemain, ils se rencontrent à nouveau. Le gamin est toujours en pleurs.
- Alors cette fois, pourquoi pleures-tu ? lui demande le plus âgé.
- Je pleure parce que je n'ai rien à manger.
- Je pensais bien qu'on allait en arriver là.

Robert Louis Stevenson
 

 

Par larouge • Berti Eduardo • Samedi 13/08/2011 • 0 commentaires  • Lu 1523 fois • Version imprimable

L'Inoubliable

 

L'Inoubliable
Eduardo Berti (auteur), Jean-Marie Saint-Lu (traducteur)







  • Broché: 125 pages
  • Editeur : Actes Sud (1 mai 2011)
  • Collection : ROMANS, NOUVELL

Un homme, qui porte en son corps une multitude d'éclats d'obus tombés en 1916, explose en pleine nuit quelque cinquante ans plus tard. Un adolescent, affligé d'un abominable nez qu'il pense être le sceau d'un lignage, se découvre l'instrument dune terrible vengeance familiale. Une lectrice compulsive de quotidiens tient le journal de ses lectures exhaustives, et. pour elle, ce qui ne figure pas sur le papier échappe à toute réalité... C'est l'inquiétant amalgame entre l'expérience sensible et l'extravagance fantastique qui maille ces douze nouvelles, superbes de concision et de subtilité, où toujours surgit l'élément perturbateur, repoussant les frontières de la logique jusqu'aux lisières de l'absurde. L'héritage des maîtres argentins est manifeste dans ce jeu constant entre fiction et rationalité. Mais alors que ses prédécesseurs privilégiaient le subterfuge de l'érudition, Eduardo Berti ancre ses récits dans une culture plus prosaïque et crée une osmose envoûtante entre cieux univers étrangement perméables.

 

 


Par larouge • Berti Eduardo • Jeudi 16/06/2011 • 0 commentaires  • Lu 1575 fois • Version imprimable

à propos de l'inoubliable

 

14/06/2011 | Critique | Fiction


Parmi tous les écrivains argentins d’aujourd’hui, Eduardo Berti est sans doute l’héritier le plus fidèle de la tradition du fantastique et du texte bref issue des Borges, Bioy Casares et Cortázar. Érudit, malicieux, il joue d’ailleurs sans se cacher avec ces références prestigieuses et la mythologie qu’elles charrient, comme dans son roman Tous les Funes, bâti autour d’un chercheur nommé Jean-Yves Funès, spécialiste des personnages nommés Funes qui fleurissent chez Borges, Quiroga, Augusto Roa Bastos ou Bioy Casares... De même, les merveilleuses miniatures de La Vie impossible (une collection de micro-nouvelles sur des artistes bizarres, des livres rares et divers phénomènes fantastiques) n’étaient pas sans rappeler les « anecdotes » qu’adorait Borges . Rien d’étonnant, donc, si Eduardo Berti continue dans cette veine avec L’Inoubliable, douze nouvelles où éclatent de nouveau son imagination labyrinthique et son talent de conteur. Plus que dans le sillage de Borges (encore que nombre de thèmes du livre possèdent des résonances borgésiennes, comme l’obsession du savoir total ou l’éternel retour du même), c’est peut-être dans celui de Bioy Casares qu’il faut situer ces textes, à cause de leur décor populaire, de leurs personnages modestes et de leur narration directe, dans un style net et coulant. Ici, pas de métaphysiciens, de lettrés bibliophiles à la Borges ou de références littéraires ; Eduardo Berti propose certes des personnages de lecteurs compulsifs qui n’auraient pas déparé dansFictions, mais ce sont de simples lecteurs de quotidiens (« Journal d’une lectrice de journaux »), dont le goût pour les nouvelles fraîches se dérègle et qui finissent par vouloir lire la presse du jour en entier, croyant que ce qui n’est pas imprimé n’existe pas... Idée derrière laquelle on retrouve du reste un motif classique chez cet auteur - directement issu, pour le coup, des fictions borgésiennes -, celui de la différence entre le réel et son récit, entre le monde sensible et ce qu’on en dit. Ailleurs, Berti s’essaie brillamment à la nouvelle à chute (« La copie », sur la méprise et l’imitation en art), joue sur un mode policier avec le thème de la coïncidence (« Hugh Williams », sûrement le chef-d’oeuvre du recueil, où il met en scène une série de naufrages maritimes dont l’unique rescapé, étrangement, porte toujours le même nom, à des siècles de distance), retrouve dans « Formes d’oubli » sa vieille passion du tango (il y a consacré plusieurs documentaires télévisés) et manipule toutes sortes de motifs familiers pour les amateurs de fantastique et de nouvelles argentines - le même et l’autre, le cycle, la fatalité, etc. Difficile de résister au charme de ces inventions brèves où l’auteur montre qu’il est possible de perpétuer la tradition ou, ce qui revient au même, que celle-ci est inépuisable, en tout cas quand celui qui s’en empare est, comme ici, digne des grands maîtres.

 

Par Bernard Quiriny

source: http://www.magazine-litteraire.com/content/rss/article?id=19428



Par larouge • Berti Eduardo • Jeudi 16/06/2011 • 0 commentaires  • Lu 1646 fois • Version imprimable

L'Ombre du boxeur

L'Ombre du boxeur
de Eduardo Berti




 

 

Broché: 182 pages

Editeur : Actes Sud (3 février 2009)

Collection : Lettres latino-américaines


Pendant les années soixante-dix à Buenos Aires, un archiviste du Congrès régale tous les soirs ses garçons de l'histoire de Justino qui, loin des strass hollywoodiens, a tout d'un Rocky argentin : le regard doux et franc, le sourire candide. Son fait d'arme : l'unique victoire par KO sur un adversaire qui deviendra champion national et à qui, toujours, il a refusé la revanche en raison d'une promesse faite à son épouse. Cette revanche a peut-être eu lieu, les variantes abondent, mais si le récit plaît tant c'est que l'énigme sportive se double d'une intrigue qui concerne les enfants au premier chef. L'ex-boxeur, reconverti en serrurier horloger, est au cœur d'un autre combat, amoureux celui-là, que se livrent les tantes des enfants, deux vieilles filles aigries jusqu'à la moelle qui cachent de frémissants secrets sous une irrésistible bigoterie. Seule la vieille horloge de la famille, entretenue autrefois par Justin, pourrait combler les lacunes de l'histoire. Les garçons devenus adultes en retrouvent la clef, mais le temps grippe tous les mécanismes... La parole collective, qui circule savamment entre les fils, densifie les symboles pour mettre au jour les rapports fraternels, l'amour et ses promesses, le paradis perdu de l'enfance et la complaisance d'une génération face à la dictature.


 

 

 

L'histoire de la famille des trois frères qui narrent L'Ombre du boxeur croise deux fois celle de l'ex-boxeur Justino, pour éclaircir deux énigmes qui s'entrelacent : l'une sportive et l'autre sentimentale. L'ex-boxeur est au centre du combat amoureux que se livrent les deux tantes des narrateurs : deux vieilles filles qui cachent, sous leur bigoterie, de frémissants secrets. Eduardo Berti a opté pour la première personne du pluriel, qu'il fait savamment circuler entre les trois frères, mettant ainsi en perspective les rapports fraternels, l'amour et ses promesses, la perte de l'enfance et la complaisance d'une génération face à la dictature. Traduit de l'espagnol (Argentine). Du même auteur : Madame Wakefield ; Rétrospective de Bernabé Lofeudo.

 


Par larouge • Berti Eduardo • Dimanche 14/06/2009 • 0 commentaires  • Lu 1254 fois • Version imprimable

Madame Wakefield

Madame Wakefield
de Eduardo Berti

 


Editeur(s) : Actes Sud
Collection : BABEL N°789
Date de Parution : 30/01/2007

Paisible fonctionnaire et terne époux, M.Wakefield décide un jour de s'absenter : il jette quelques affaires dans une valise, prétexte la nécessité d'un court voyage et disparaît. Les jours passent, M. Wakefield ne revient pas et Mme Wakefield découvre bientôt qu'il s'est installé... de l'autre côté de la rue ! Pensant qu'il ne tardera pas à revenir à la raison, elle attend. Et les années s'écoulent... Cette brillante réécriture du conte de Nathaniel Hawthorne, Wakefield, se place du côté de l'épouse avec un ton cocasse et cruel, brocardant le conformisme puritain de Mme Wakefield tout en s'amusant de son exemplaire fidélité à l'incompréhensible mari.Un volume manque dans la bibliothèque du fugueur, se peut-il que ce livre constitue le début d'une explication ?
Cette histoire existait déjà. Le comte Nathaniel Hawthorne avait écrit un Monsieur Wakefield, l'histoire d'un homme qui sans raison apparente avait disparu, quitté sa femme sans mot dire. On le croyait parti au bout du monde, il était seulement parti s'installer dans l'immeuble d'en face. Borgès avait aimé ce roman qu'il avait salué dans un article élogieux. Il faut dire que le thème en était on ne peut plus borgésien.
Eduardo Berti, écrivain argentin, reprend l'histoire d'Hawthorne en inversant les points de vue. Ce qui l'intéresse dans Madame Wakefield, c'est la façon dont réagit madame. Au lieu de se contenter de l'exercice de style qui consiste à relater la même histoire d'un autre point de vue, Eduardo Berti écrit le portrait sensible d'une femme qui cherche à s'accommoder de sa nouvelle vie pour découvrir l'inexistence de l'ancienne. Roman métaphorique dans sa composition, roman métaphysique dans ses questionnements, Madame Wakefield est finalement un roman authentique. Borgès aurait aimé. --
Denis Gombert
Par larouge • Berti Eduardo • Dimanche 14/06/2009 • 0 commentaires  • Lu 1292 fois • Version imprimable

à propos de Madame Wakefield

en 1835 Nathaniel Hawthorne ecrivait la tres courte nouvelle: Monsieur Wakefiel, histoire absurde de cet homme qui quitte son domicile conjugal, sous pretexte d'un voyage d'affaires, pour s'installer dans un hotel, presque en face de sa maison, abandonnant ainsi son foyer, pour rien, pour le simple absurde qui nous gouverne parfois. mais rarement a ce point là.
dans Madame Wakefield, Eduardo Berti se place du point de vue de la femme de cet étrange fonctionnaire.
Madame Wakefield pretendra pendant vingt ans, être veuve. mais suit dans la rue un homme à la perruque rousse qui ressemble etrangement a son mari. Lorsqu'elle comprend que cet inconnu au costume marron et à la perruque rouge est reellement monsieur Wakefield, elle va avec sa servante Amalia, faire tout son possible pour faciliter la vie au mari fuyard.
Eduardo Berti nous emmene dans cette histoire absurde sur l'absurde, avec beaucoup de bonheur, et nous le suivons avec plaisir.i

la rouge



Par larouge • Berti Eduardo • Dimanche 14/06/2009 • 0 commentaires  • Lu 1266 fois • Version imprimable

Les Petits Miroirs, Los Pequeños Espejos

Les Petits Miroirs, Los Pequeños Espejos.
Edition bilingue français-espagnol
Eduardo Berti, Jean-Marie Saint-Lu (Traducteur)

MEET
LES BILINGUES
136 pages

Eduardo Berti réinvente cet exercice de style cher aux miniaturistes et aux moralistes que sont les aphorismes.Dans chaque forme brève, ou dans le puzzle que construit l’ensemble, on peut soupçonner la promesse de récits à inventer. Il avait tant de choses à raconter qu’il envoya un perroquet voyageur.


Par larouge • Berti Eduardo • Dimanche 14/06/2009 • 0 commentaires  • Lu 1332 fois • Version imprimable

court extrait de “Les petits miroirs"

Les Petits Miroirs

Tes secrets, tes ombres

I

Ton futur est une plage faite de traces façonnées. Quand tu marches, plutôt que faire simplement des pas, tu les accomplis. Tu obéis à quelque chose d’écrit à l’avance par des pas qui, bien qu’ils ne soient pas les tiens, se transforment en destin à mesure que tu traverses le miroir de sable.

II

Au fond le bonheur te fait mal ; tu sais qu’il passera et survivra comme ces étoiles qui éclairent encore, décapitées.

III

Ta peau fait taire le débordement de tout un air vivant. Sur elle s’est fragilement cristallisé un linceul paisible qui veille, en le protégeant, sur le tiède abîme du sang, le vertige revêche du temps.

source: http://www.meet.asso.fr/


Rétrospective de Bernabé Lofeudo

Rétrospective de Bernabé Lofeudo
de Eduardo Berti, Jean-Marie Saint-Lu (Traduction)

Broché: 53 pages
Editeur : Actes Sud (24 janvier 2007)
Collection : Un endroit où aller
Voici les aventures cinématographiques et personnelles d’un cinéaste argentin imaginaire, Bernabé Lofeudo, sévissant dans les années 1920, l’âge d’or du cinéma muet. Relevant le défi que lui lance un ami boxeur, le cinéaste spécialisé jusque-là dans les bovins de la pampa argentine oriente en effet son œuvre vers la sensualité et l’érotisme. La rencontre avec la pétillante Nelly Marchi est décisive… Jouant les biographes sérieux, l’auteur pointe avec malice et tendresse la destinée tragicomique d’un raté magnifique, incompris par les producteurs et délaissé par ses actrices favorites.
On affirme souvent que si Bernabé Lofeudo n’avait tourné que ce film, cela aurait suffi à lui conférer une place prédominante dans l’histoire du cinéma muet argentin. On affirme souvent, aussi, qu’aucune de ses productions antérieures ne laissait prévoir le caractère d’Un été, bien qu’il soit difficile aujourd’hui de le vérifier : desdites œuvres - brûlées ou perdues, qui pourrait le dire ? -, on conserve à peine quelques photogrammes et un plan qui ne fait pas plus de quinze secondes. Quoi qu’il en soit, il est clair que ce film détermine une coupure très nette : si les premiers travaux de Lofeudo formaient une trilogie gauchesque où l’on comptait - selon la critique - “plus de chevaux et de vaches que d’acteurs”, c’est à partir d’ Un été que le cinéaste se situera dans une atmosphère plus cosmopolite, et se montrera attentif à la sensibilité féminine, pour devenir un “authentique pionnier du mélodrame érotique local”. E. B.


à propos de “Rétrospective de Bernabé Lofuedo”

Rétrospective de Bernabé Lofuedo
Eduardo Berti
L’écrivain argentin Eduardo Berti joue les biographes en retraçant la vie du cinéaste Bernabé Lofeudo dans une Rétrospective entre vérité et mensonge.
Avez-vous déjà entendu parler de Bernabé Lofeudo ? Cinéaste argentin, il a connu son heure de gloire au cours des années 1920, âge d’or du cinéma muet. Ses oeuvres, Un été, Vie indécente ou encore Destination Valparaíso ont fait l’objet de nombreuses études dont la célèbre analyse de Ricardo Hofman, Sexe et morale chez Bernabé Lofeudo. Pendant de longues années, il forma, à la vie comme à l’écran, un tandem électrique avec la sulfureuse actrice, Nelly Marchi. Jusqu’en 1951, date à laquelle il fut emporté par une maladie foudroyante, il se voua tout entier au septième art, le plus souvent au détriment de sa vie personnelle. Son cinéma, miroir d’une existence hors du commun, suscite encore les plus vives polémiques. Restent à présent une poignée de biographies plus ou moins fidèles, une importante correspondance et surtout quelques-unes des oeuvres majeures du cinéma argentin du siècle dernier. Autant d’éléments dont s’est servi le romancier Eduardo Berti pour élaborer sa Rétrospective de Bernabé Lofeudo. Ce texte, brillant hommage au travail et à la vie du cinéaste, recèle mille et une anecdotes croustillantes tant sur ses tournages que sur sa relation avec Nelly Marchi. Nous avons assurément affaire à un artiste singulier. Que personne ou presque n’en ait jamais entendu parler - du moins avant cette Rétrospective - laisse tout de même songeur… Et si Bernabé Lofeudo n’avait jamais existé ? Supposons un instant que ce cinéaste plus vrai que nature ait été fabriqué de toutes pièces par Eduardo Berti. L’auteur est-il un crypto-épigone des Borges et Bioy Casares, qui publiaient en 1960 les Chroniques de Bustos Domecq, ce critique littéraire né de leur imagination qui n’écrivait qu’au sujet de livres inventés ? Dans Rétrospective de Bernabé Lofeudo, études, témoignages, filmographie sonnent incroyablement juste. Comment croire qu’il ne s’agisse que d’un habile trompe-l’oeil littéraire ? Si tel était le cas, cet ouvrage serait un véritable tour de force en même temps qu’un exercice savoureux nous permettant de découvrir la fausse vraie vie d’un monstre du cinéma argentin. Laquelle, de la réalité ou de la fiction, prend le pas sur l’autre ? Eduardo Berti ne le dit pas et c’est tant mieux. Il est parfois si doux de se laisser bercer d’illusions.
Par : Ellen Salvi
© www.transfuge.fr

Tous les Funes

Tous les Funes
de Eduardo Berti, Jean-Marie Saint-Lu (Traduction)

Broché: 170 pages
Editeur : Actes Sud (2 novembre 2005)
Collection : Le cabinet de lecture

Tous les Funes est, au meilleur des sens, un roman littéraire, et il s’alimente de ses propres sources.Dans la tentative du professeur octogénaire de cataloguer tous les Funes de la fiction en langue espagnole, il y a une reconnaissance de ce qui est commun, d’une vision du monde partagée grâce aux mots, mais aussi de la banalité de tels travaux par ceux qui croient qu’ajouter une histoire de plus aux bibliothèques du monde pourrait nous aider à le comprendre dans toute son immense absurdité. De tous les Funes rassemblés par Funès, le plus célèbre est sans doute celui de Borges, l’héritier (ainsi que le fait remarquer le professeur Funès) du Memory de Hitchcock dans les Trente-Neuf marches, un jeune homme qui, dans sa pauvre cabane de la campagne uruguayenne, vers la fin du XIXe siècle, est condamné à se souvenir de tout, jour après jour et nuit après nuit, jusqu’à sa mort précoce à l’âge de vingt et un ans.[…] Tous les Funes est un palais des miroirs autoréférentiel, un recensement magique qui, dans sa tentative d’inclure tous les Funes, doit à un certain moment s’inclure lui-même, filant en spirale vers l’infini, pour notre joie et notre ravissement.
Tous les Funes de Eduardo Berti (argentine)
Tous les Funes est, au meilleur des sens, un roman littéraire, et il s’alimente de ses propres sources. Dans la tentative du professeur octogénaire de cataloguer tous les Funes de la fiction en langue espagnole, il y a une reconnaissance de ce qui est commun, d’une vision du monde partagée grâce aux mots, mais aussi de la banalité de tels travaux par ceux qui croient qu’ajouter une histoire de plus aux bibliothèques du monde pourrait nous aider à le comprendre clans toute son immense absurdité.De tous les Funes rassemblés par Funès, le plus célèbre est sans doute celui de Borges, l’héritier (ainsi que le fait remarquer le professeur Funès) du Mr Memory de Hitchcock dans les Trente-Neuf marches, un jeune homme qui, dans sa pauvre cabane de la campagne uruguayenne, vers la fin clu XIXe siècle, est condamné à se souvenir de tout, jour après jour et nuit après nuit, jusqu’à sa mort précoce à l’âge de vingt et un ans. (…)Tous les Funes est un palais des miroirs autoréféren-tiel, un recensement magique qui, dans sa tentative d’inclure tous les Funes, doit à un certain moment s’inclure lui-même, filant en spirale vers l’infini, pour notre joie et notre ravissement.”
Alberto MANGUEL (extrait de la postface)


à propos de “Tous les Funes”

En intitulant son dernier roman Tous les Funes, Eduardo Berti, le place évidemment sous l’invocation de Jorge Luis Borges, le père de la littérature argentine moderne, et, sans doute, de toute l’Amérique latine. La première nouvelle d’Artifices (deuxième partie du recueil Fictions) a comme titre le nom du personnage Irénée Funes, un original qu’un accident rend hypermnésique (mémoire hypertrophiée) : « Funes ou la mémoire ». Cette nouvelle est l’une des plus célèbres de Borges. L’allusion est donc évidente à quiconque connaît tant soit peu la littérature d’Amérique latine. Ce titre, s’il est une promesse de voyage littéraire, crée aussi chez le lecteur une exigence à la hauteur de la référence.
Or, le lecteur ne laisse pas d’être étonné de découvrir un Funès qui n’est pas celui de Borges, qui n’est même pas urugayen (comme l’est Irénée Funes dans la nouvelle). Ce n’est pas non plus un jeune homme, encore moins original. Le personnage auquel le roman lie notre lecture est un vieil homme, presque octogénaire, dont nous découvrons rapidement qu’il est professeur émérite (à la retraite) de littérature d’Amérique latine. L’attente née du titre n’est pas déçue, mais au contraire accrue par ce qui est une promesse de considérations sur la littérature d’Amérique latine.
Nous suivons en effet ce professeur en route vers Lyon où il se rend pour participer à un colloque sur sa spécialité. Très vite, il devient évident qu’Eduardo Berti se joue de nous. Contrairement à son modèle borgesien, Jean-Yves Funès a des troubles de mémoire et ne cesse de faire effort pour se souvenir de ses précédents séjours à Lyon où il est venu en compagnie de son épouse. Contrairement à son modèle qui s’efforce d’organiser sa mémoire et de classer ses souvenirs car il éprouve la singularité de chaque sensation, y consacre tout son temps et toute son énergie, le personnage que nous accompagnons a une mémoire désordonnée, s’avère incapable de ne pas fondre et confondre les sensations passées et présentes, les noms, les visages et les lieux.
Le roman dont il vaut mieux ne pas déflorer le cours des événements à cause des surprises que le narrateur ménage au lecteur donne une impression de liberté rare. La narration ne s’interdit aucune forme, aucune coïncidence, aucune ressource référentielle (littéraire, historique, etc.). Les discussions auxquelles participent les personnages explorent les questions de la mémoire, du nom, de la coïncidence, de l’héritage littéraire et onomastique et donnent l’impression que ce qui s’y joue est aussi important que l’est la découverte du coupable dans un roman policier.
« Tous les Funes » n’est pas seulement le titre du roman que nous lisons, il est aussi celui d’un livre que le personnage principal rêve d’écrire et dont la matière, la forme et les difficultés sont discutées par les personnages.
Nous ne sommes plus habitués, sans doute, par ces jeux auxquels joue l’auteur dans son roman faisant du lecteur tantôt un complice amusé tantôt un gogo trompé. Les références ne sont pas toutes explicites et une partie du plaisir de la lecture (une partie seulement, le plaisir réside essentiellement dans la narration elle-même, menée avec une admirable maîtrise, sans longueurs et pleine d’interruptions salutaires) tient au sentiment qu’il y a toujours derrière les mots plus que ce qu’on y lit.
Par son thème, par le type de relation institué entre les personnages (discussions à l’occasion d’un colloque), par ses jeux référenciels, ce roman fait écho à deux romans récents ; l’un argentin, intitulé La traduction de Pablo de Santis, placé lui aussi sous l’autorité de Borges, et l’autre brésilien, intitulé Borges et les orangs-outangs éternels de Luis Verrissimo. Avec ce dernier, il partage l’humour et le jeu.
L’humour d’Eduardo Berti était déjà très efficace dans La vie impossible, son précédent livre, construit comme une série de résumés de nouvelles à écrire (de pitchs disent les Américains) souvent fondées sur un paradoxe cocasse. Il se retrouve ici sous de multiples formes dont ce petit morceau où Jean-Yves Funès  discute avec une poète chilienne : « la pipe est le contraire des femmes, et savez-vous pourquoi ? Elena fut surprise et Funès rit, la pipe entre les dents, avant d’expliquer : Une pipe vierge a un gros trou qui rétrécit peu à peu à l’usage, plus une pipe est vieille et plus étroit est son trou, meilleur goût elle a, il ne faut pas utiliser une pipe quand elle est chaude, mais attendre qu’elle refroidisse, et il faut qu’une pipe soit sèche, elle ne vaut rien si elle est humide. » Ou comment être graveleux avec délicatesse !
Le style d’Eduardo Berti qu’Alberto Manguel compare à celui de Bioy Casarès, a souvent, il nous semble, l’évidence et l’efficacité de Coratzar à qui il emprunte cet art de tromper son lecteur avec son consentement, sinon sa complicité. Ces comparaisons seraient oiseuses si Eduardo Berti ne cessait par les références qu’il affronte de se mesurer aux plus grands et de se hisser jusqu’à eux au point de trouver une voix lui permettant de dialoguer avec eux sans les copier.

Cyril de Pins

© www.boojum-mag.net


autre à propos de “Tous les Funes”

Eduardo Berti - Tous les Funes

Les formidables miniatures de La Vie impossible, un recueil de brèves nouvelles d’une efficacité inversement proportionnelle à leurs dimensions, méritaient sans discussion la comparaison avec les “anecdotes” dont Borges remplissait au début des années 30 les pages culturelles de la Revista multicolor de los Sábados. Don pour le fantastique, goût des curiosités artistiques et bibliophiliques, subversion des genres littéraires, récurrence des thèmes de la bibliothèque, de la langue et du livre dans le livre, tout indiquait la familiarité d’Eduardo Berti avec l’univers de son prestigieux compatriote. Cette fois-ci, l’hommage est explicite : Tous les Funes est construit à partir de “Funes ou la mémoire”, l’une des plus célèbres nouvelles de Borges ; l’écrivain argentin y raconte l’histoire d’un jeune type qu’un accident a rendu incapable d’oublier quoi que ce soit, le condamnant à se souvenir de tout, seconde par seconde, détail par détail. “Il pouvait reconstituer tous les rêves, tous les demi-rêves. Deux ou trois fois il avait reconstitué un jour entier ; il n’avait jamais hésité, mais chaque reconstitution avait demandé un jour entier”. Cette mémoire monstrueuse et absurde, “comme un tas d’ordures”, finit par l’engloutir en l’empêchant à la fois de vivre et de penser. Comme le Bartleby de Melville, l’étrange Funes fait partie de cette petite congrégation de héros littéraires si fascinants qu’ils ont fini par sortir du texte dans lequel ils sont nés : appropriés, parasités, réinventés, ils se baladent désormais en littérature comme des personnages autonomes, générant toute une descendance au chef-d’œuvre originel. Dans le cas d’Eduardo Berti, le jeu ne se limite pas à la simple reprise du personnage inventé par Borges : c’est l’idée même d’hommage littéraire et d’envahissement de la réalité par la fiction qu’il met au centre de son roman, la monomanie des Funes débouchant sur une ingénieuse mise en abyme du roman qui s’écroule sans cesse sur lui-même, comme un trou noir.

Le narrateur s’appelle Jean-Yves Funès (avec un accent), universitaire retraité à la santé déclinante, spécialiste de la littérature sud-américaine. Son truc à lui, nom de famille oblige, c’est les Funes. La lecture du conte de Borges a été le choc de sa vie : “Après que j’ai lu cette nouvelle pour la première fois, rien n’a plus été pareil, si je vous disais que j’en suis arrivé à l’apprendre par coeur”. Du coup, il s’est lancé dans le projet fou de répertorier tous les Funes de la littérature. “Je suis une espèce de collectionneur, explique-t-il, je collectionne toutes les oeuvres littéraires dans lesquelles apparaissent des personnages du nom de Funes”. Et des Funes, la littérature sud-américaine n’en manque pas : outre celui de Borges, il y en a un chez Horacio Quiroga (dans “La Méningite et son ombre”), un chez Augusto Roa Bastos (dans “L’Oiseau-mouche”) et peut-être un chez Adolfo Bioy Casares (lequel, prétendent certains, aurait eu sous le coude une nouvelle centrée sur un toubib nommé Funes). Le patronyme n’a pas échappé non plus à Julio Cortázar, dont les “Nouvelles des Funes” tournent autour de cette mystérieuse récurrence onomastique. Jean-Yves Funès, donc, est invité à Lyon pour un colloque organisé par une vieille connaissance, le professeur Nazaire. Dès le départ, le voyage ne se déroule pas comme il devrait ; Funès loupe son train, est accueilli à la gare par un ancien étudiant qu’il ne reconnaît pas, se voit proposer une visite commentée du quartier Saint-Jean par un aveugle et fait un malaise dans un restaurant marocain. Tout se détraque. L’hôtel envoie un docteur dans sa chambre. Son nom ? Funes. Plus loin, un avocat sonne à sa porte. Son nom ? Funes aussi. La réalité s’embrume, l’hallucination guette, la fiction déborde par-dessus sa cuve : en se déversant dans le réel, ses homonymes littéraires obligent Funès à dévoiler l’imposture sur laquelle il a bâti sa vie et à avouer qu’il n’est pas un vrai Funes, contrairement à ce qu’il a toujours voulu faire croire.

Tous les Funes est, au meilleur des sens, un roman littéraire, et il s’alimente de ses propres sources”, écrit Alberto Manguel dans sa préface : en effet, rarement un livre se sera aussi intimement noué aux chefs-d’œuvre qui l’ont inspiré, ce nœud étant en fin de compte son principal sujet. S’il a pris le parti de jouer à fond la carte des références, Eduardo Berti n’en a pas pour autant composé un roman pour initiés : son plongeon dans l’océan des Funes est d’abord et avant tout le déclencheur d’un formidable jeu de miroirs qui dissout la barrière entre le fictif et le réel et exploite les vertiges du paradoxe et de l’auto-inclusion, comme dans ces gravures impossibles d’Escher où une main dessine celle qui la dessine et inversement. Théorique ? Peut-être, mais sans formalisme. Ludique ? Bien sûr, mais pas seulement. Métaphysique ? Voire. Après tout, notait Borges (encore lui), la métaphysique, ce n’est jamais “qu’une partie de la littérature fantastique”.

Bernard Quiriny

source: http://www.chronicart.com


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