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Un Terrible Voyage au coeur du maelström de la folie

Par larouge • Arlt Roberto • Vendredi 12/06/2009 • 0 commentaires  • Lu 667 fois • Version imprimable

  • Currently 3/5

Note : 3/5 (2 notes)

jeudi 14 janvier 2010


Un Terrible Voyage au coeur du maelström de la folie


Si Roberto Arlt a écrit essentiellement des oeuvres qui sombrent dans une noirceur absolue, il a aussi composé des récits qui témoignent d'autres qualités insoupçonnées chez cet auteur.

Un Terrible Voyage est un court roman composé un an avant la mort de Arlt. S'il ne s'agit assurément pas de son oeuvre la plus puissante, cette courte aventure maritime comporte un humour savoureux qui la rend si attachante.

Un jeune homme coupable de divers forfaits sur les terres chiliennes, trouve dans une mission géologique de l'autre côté de la mer, l'occasion de se racheter aux yeux des autorités.
Or, durant sa traversée pour regagner la Terre promise, il sera confronté à une série de catastrophes qui s'enchaînent sans que rien ne puisse l'interrompre.

Cette vague de malheurs qui s'abat inéluctablement sur l'équipage est annoncée dès le début par le cousin du personnage principal, Luciano, qui invoque le changement de nom du paquebot pour justifier les maux qui risquent de s'abattre sur eux.
Si, dans un premier temps, le caractère superstitieux de notre Luciano compromet sa crédibilité, différents événements sèmeront le doute dans les esprits, jusqu'à ce que le pire s'abatte sur eux.

Pourtant, le contraste apparent des éléments, le vent déchaîné et le calme plat de l'océan, la foudre sur fond de ciel clair et les couleurs surnaturelles de l'environnement, présagent d'un cataclysme à venir, qui provoquera la rupture du barrage contenant les passions les plus sournoises de cette micro-humanité.

D'emblée, on peut se poser des questions sur les différents membres de l'équipage.
Pas un ne semble à sa place. Le garçon de cabine est un ancien aiguilleur responsable d'une collision de deux trains de marchandises, le médecin semble être davantage doué pour sa qualité de gynécologue occulte que pour ses talents scientifiques; le commandant de bord, quant à lui, semble être un personnage violent et inflexible, incapable de tenir un gouvernail.
Les passagers n'inspirent guère plus confiance. Qu'ils soient chrétiens ou musulmans, ils n'affichent une ferveur religieuse que pour dissimuler au mieux les pensées malsaines qui se tapissent en eux.

C'est ce décalage invraisemblable et frappant que Roberto Arlt se fait un malin plaisir à démontrer insidieusement dans des lignes d'une délicieuse ironie.
Même la plus valeureuse personne à bord, Annie, une chimiste émérite, de laquelle s'amourache le personnage principal, a en tête des projets incroyables mais n'est peut-être pas si admirable...
Pour l'abriter du mal qui contamine ce bateau incontrôlable, le jeune homme espère l'emmener avec lui dans les contrées préservées de Shangaï.

Roberto Arlt a adopté pour cette oeuvre un style épuré et d'une fougue exemplaire.
L'enquête à bord, la part de fantastique que le cours de l'histoire laisse envisager, et le surprenant dénouement de toute cette aventure, rappelle quelque peu l'ironie mordante de Gilbert Keith Chesterton et ses enquêtes du Père Brown.
Pour Helios Jaime Ramirez, l'insertion de la farce dans le fantastique fait songer à la nouvelle Le Vase d'Or de E.T.A. Hoffmann.
Cependant, il est indéniable que Roberto Arlt se démarque par un style qui tend à annihiler toute uniformité au ton de l'ensemble.
Nous ne sommes ici, ni dans le fantastique, ni dans le scientifique, ni encore dans la tragédie, ni même dans le comique, mais plutôt au coeur d'une sorte de maelström, qui nous propulse instantanément aux extrêmes limites de ces tonalités opposées.

courtoisie de: http://latavernedudogeloredan.blogspot.com/

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