Sciences morales
de Martin Kohan (Auteur), Gabriel Iaculli (Traduction)
Broché: 197 pages
Editeur : Seuil (11 février 2010)
• Une tension narrative extrême, une écriture sobre et froide, un lieu clos, caractérisent ce roman très fort et très dérangeant qui dénonce l’intromission de la morale fasciste dans la vie quotidienne de l’Argentine à l’époque de la dictature militaire.Le Colegio Nacional de Buenos Aires, lieu de formation des futures élites du pays, était à l’époque connu pour sa rigueur disciplinaire et sa cruauté psychologique. Il était censé préserver les élèves de tout ce qui se passait hors de ses murs. Le roman se centre sur deux personnages : Maria Teresa la jeune surveillante, timide, ignorante, à la sexualité réprimée, qui vit avec sa mère et dont le frère a été mobilisé pour être envoyé aux Malouines, et son supérieur hiérarchique M. Biasutto, implacable maître des cérémonies, dont on comprend au passage qu’il a organisé des listes noires (pendant la dictature plusieurs élèves de ce collège ont disparu). Maria Teresa, qui admire Biasutto, va s’efforcer d’appliquer les consignes à la lettre et croyant percevoir une vague odeur de tabac sur un de ses élèves, s’enferme dans les toilettes des garçons pour tenter de le piéger et de le dénoncer. Peu à peu elle prend plaisir à espionner les élèves, à les écouter uriner, à uriner en même temps qu’eux, à tenter de voir leur sexe, toujours dans l’obsession d’en prendre un en flagrant délit de fumer. Jusqu’au jour ou Biasutto la surprend et fait d’elle la victime de ce système qu’elle avait elle-même cautionné sans s’en rendre compte.C’est un roman très fort, qui n’est pas sans rappeler la tension que l’on trouve chez Elfriede Jelinek et certains auteurs allemands, et dont le propos dépasse largement le cadre de l’Argentine des années quatre-vingt.
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