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LE PLAN DES VILLES

Par larouge • Romero Norberto Luis • Samedi 01/09/2012 • 0 commentaires  • Lu 1585 fois • Version imprimable

LE PLAN DES VILLES

 

 

Ninive, Ecbatane, Cyrene, Samarcande, toutes ces villes ont disparu par engloutissement. Certaines ont été englouties brusquement, d’autres peu á peu. Certaines ont réapparu et persistent comme ruines éparses, mais il y en a qui attendent encore d’être régurgitées.

L’engloutissement ne se produit pas toujours de la même manière; des fois, les villes disparaissent complètement dans un court laps de temps, d’autres par morceaux et progressivement. Ecbatane commença à disparaître par les faubourgs de sa périphérie, avant de voir disparaître les palais et les temples qui se trouvaient dans son centre. Sodome et Gomorre sont un cas typique de disparition soudaine. Fréquemment, seulement une partie est engloutie et d’autres parties ne le sont que des siècles ou même des millénaires plus tard.

Carthage fut dévorée 7 fois et 7 fois régurgitée. Ses ruines successives ainsi le montrent.

II est inutile de s’alarmer et, par ailleurs, presque personne ne le fait. II n’y a que les imbéciles et les  lâches qui tentent de fuir des qu’ils entendent des rumeurs d’un prochain effondrement, Les disparitions sont imprévisibles: L’engloutissement d’une maison ou d’un temple n’est pas le symptôme sur de l’engloutissement de la ville entière.

Une légende affirme que les villes englouties émergent tôt ou tard dans un autre endroit de la terre, ou bien dans I’endroit même de leur disparition. Un dicton dit que tout mouvement descendant appelle á un mouvement inverse. Le sens commun du citoyen est tout imprégné de ce dicton et, ainsi, presque personne ne s’en préoccupe.

Au septième siècle avant Jésus-Christ une splendide ville sombra dans le désert du Thar; onze siècles plus tard, une autre ville similaire émergea dans un endroit des Andes Péruviennes. Des chercheurs, bons connaisseurs des mouvements des villes, sont d’accord pour dire que les deux sont la même. Ils affirment aussi que Constantinople se trouvait dans les steppes de Caucase quatre siècles plus tôt, que les preuves sont irréfutables et que seulement les ignorants peuvent les refuser. Pourtant, retrouver certains livres de la bibliothèque d’Assurbanipal serait la seule preuve absolue de leur théorie. Ils avancent aussi que les musées d’histoire et d’anthropologie sont pleins de preuves: des objets, petits et grands, démontrent clairement qu’ils proviennent d'une ville régurgitée, mais ces preuves passent inaperçues au commun des mortels.

Un grand espoir naît de l’apparition possible et annoncée d’une ville de dimension colossale, engloutie il y a deux mille quatre cents ans et dont les ruines n’ont jamais été trouvées. Herodote, dans le quatrième Livre de L’Histoire, la décrit en détail, et il mentionne aussi, sans donner trop d’importance á ce fait, la disparitions de certaines maisons de maîtres, Les contradicteurs des croyants argumentent que Herodote avoue ne pas avoir été le témoin direct des faits. Pourtant, affirmer, comme certains le font, que cette ville réapparaître dans notre siècle, sont, de toute façon, téméraires, étant donné que la disparition et la résurgence des villes est complètement arbitraire et imprévisible pour le commun des mortels. II existe, en plus, d’autres phénomènes, peu fréquents et néanmoins curieux, que rendent impossibles ces prédictions: parfois, la ville qui émerge n’est pas forcément celle d’origine, mais elle est composée de morceaux de deux villes ou plus. Quelquefois, aussi, on voit réapparaître la même ville, mais il y a deux ou trois maisons en plus ou en moins. Parfois, ce qui est en trop n’est pas une maison mais seulement un objet comme un jouet, une assiette ou un peigne.

II y a juste quatre ans, une maison a été engloutie en banlieue. Bientôt on murmura que c’était le début de l’engloutissement de la ville, et quelqu’un affirma qu’une autre maison avait sombré non loin de la, douze ans plus tôt. Un témoin disait qu’il avait vu cette maison pendant un voyage en Egypte, solitaire et abandonnée, prés des marges du Haut Nil. Cet état d’abandon confirme l’hypothèse que les villes n’émergent pas toujours avec leurs habitants en elle. Ils peuvent avoir été interchangés. Cette théorie est démontrée par l’apparition fortuite d’étrangers ou bien par la disparition de familles entières ou d’individus isolés. Quoiqu’il en soit, il est clair que le mécanisme engloutissement et de résurgence des villes se fait de manière équilibrée, presque symétrique, comme I’affirme le dicton. Personnes et choses sont transférées d’un endroit á l’autre avec une rigueur absolue et moyennant un plan élaboré, quoique inconnu des hommes. Souvent, nous sommes surpris de trouver dans une ville inconnue, une maison, un objet ou une personne qui nous sont familiers: l’existence du plan est évidente.

L’improbable persistance des villes ne nous empêche pas de voyager entre elles, même si elles sont éloignées, ni de programmer ces voyages trop á l’avance. Les engrenages que commandent les engloutissements et les réapparitions des villes semblent obéir á des règles dont le temps échappa á la dimension humaine des individus, voire des générations. Cette dynamique ne semble pas beaucoup affecter les gouvernements ni les citoyens: se fiant á la permanence, pourtant cyclique, du Plan, qui les dépasse aussi bien les uns que les autres, ils s’occupent exclusivement de leurs métiers et de leurs affaires, évitant d’y faire allusion, mais surtout, d'interférer avec le Plan.

On dit que dans les temps anciens des Sages ont découvert -par déduction mathématique- les mouvements du Plan des villes. Ces connaissances sont restées cachées pendant des siècles dans la bibliothèque d’Asssurbanipal le Grand, mais il est connu que cette bibliothèque fut engloutie I1 an 544 avant Jésus Christ. De ce fait, toutes les théories ne sont que des théories. Un seul événement pourrait révéler le mystérieux mécanisme: la réapparition de cette bibliothèque. Mais celui-là pourrait être le dernier des mouvements planifiés, et impossible de savoir s’il ne manquera pas, peut-être, dans son étagère, le traite.

 Traduit par Bernardo Schiavetta

 

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