Le Livre des Eloges
de Manguel/Alberto (Auteur)
de Manguel/Alberto (Auteur)
Broché
Editeur : Escampette
Mot de l'éditeur
J'aime beaucoup l'écriture de Manguel car il n'est pas de ces écrivains qui, dans leurs essais, empruntent la ligne droite parce qu'ils savent où ils vont, mais parce qu'il appartient à cette famille d'essayistes qui prennent les textes comme si c'étaient des promenades erratiques où l'auteur s'égare et ne sait où aller, si du moins il a l'intention d'aller quelque part. Il incite le lecteur à explorer sa propre pensée. Il est vrai que Manguel exige du lecteur un réel effort d'imagination.»Enrique Vila-Matas
Extrait du livre :
(...)
Faisons donc place ici à une histoire : je suis allé à Bâle et j'aurais aimé dialoguer avec Érasme et lui dire le bonheur qu'est la lecture de ce livre d'éloges, de ce livre où l'auteur (dont je crois que s'il devait se définir lui-même, le ferait comme lecteur, et je lui adresse d'ici tous mes éloges) nous dit, entre autres choses, que pour lui un livre offert amène mystérieusement un autre lecteur qui se tient dans l'ombre : la voix, les gestes, le ton, le regard de celui qui a offert ce livre. Cela me conduit à penser, comme préfacier de la première page absente, combien j'aurais aimé être celui qui eût offert ce livre au lecteur qui est en train en ce moment d'en lire la préface. Je le lui aurais offert en connaissant le charme de ces pages d'éloges et par conséquent assuré qu'avec le temps je serais devenu pour lui - comme il est juste, par ailleurs, que tel soit le sort de tout préfacier discret - un lecteur dans l'ombre. Offrir ou préfacer un livre revient à le recommander. Puisque j'arrive trop tard pour l'offrir au lecteur qui est en train de le lire, je le recommande. Il y trouvera nombre des qualités de Manguel écrivain. L'une d'elles est, pour moi, sa conception de l'essai : son idée que l'essai doit signifier de nouveau se risquer à penser différemment, s'aventurer dans des textes où il y a place pour le doute, le commentaire et la nuance narrative qui permettent d'introduire l'essai dans le champ de la fiction.
Le livre des éloges se meut entre la fiction et l'essai, et doit probablement son heureux titre à un livre de poèmes que, sous le même intitulé, publia en 1908 un écrivain argentin très curieux, Enrique Banchs, auteur de quatre ou cinq livres de poèmes qui étonnèrent Borges, lequel en fit grand éloge, surtout La Urna (L'Urne), un livre presque parfait, qui fut publié en 1911 et mérita l'attention enthousiaste de Borges, qui ignorait à ce moment-là que son auteur, malgré ou peut-être à cause de ces éloges, resterait plus de cinquante ans sans rien écrire d'autre.
J'aime beaucoup l'écriture de Manguel car il n'est pas de ces écrivains qui, dans leurs essais, empruntent la ligne droite parce qu'ils savent où ils vont, mais parce qu'il appartient à cette famille d'essayistes qui prennent les textes comme si c'étaient des promenades erratiques où l'auteur s'égare et ne sait où aller, si du moins il a l'intention d'aller quelque part. Il incite le lecteur à explorer sa propre pensée. Il est vrai que Manguel exige du lecteur un réel effort d'imagination. Celui qui le lit de façon purement passive, éduquée et modelée par la tradition, celle par exemple du roman du XIXe, est perdu avec Manguel et peut difficilement devenir son lecteur idéal. Ne sera pas non plus un lecteur idéal celui qui, fuyant la déception de sa propre existence, recherche un monde de substitution. Seul le lecteur qui, quel qu'en soit le motif, ira lui-même à la recherche d'un regard distinct de la réalité conduisant à une vérité (même indéfinie) saura apprécier cet art de Manguel qui abstrait et laisse intact l'essentiel, renouvelle l'essai et transmet le plaisir originel du premier lecteur qu'eut le monde, celui qui commença à lire à la page deux.
Eloge d'Alberto Manguel
par Enrique Vila-Matas
Source: www.fnac.com
Editeur : Escampette
Mot de l'éditeur
J'aime beaucoup l'écriture de Manguel car il n'est pas de ces écrivains qui, dans leurs essais, empruntent la ligne droite parce qu'ils savent où ils vont, mais parce qu'il appartient à cette famille d'essayistes qui prennent les textes comme si c'étaient des promenades erratiques où l'auteur s'égare et ne sait où aller, si du moins il a l'intention d'aller quelque part. Il incite le lecteur à explorer sa propre pensée. Il est vrai que Manguel exige du lecteur un réel effort d'imagination.»Enrique Vila-Matas
Extrait du livre :
(...)
Faisons donc place ici à une histoire : je suis allé à Bâle et j'aurais aimé dialoguer avec Érasme et lui dire le bonheur qu'est la lecture de ce livre d'éloges, de ce livre où l'auteur (dont je crois que s'il devait se définir lui-même, le ferait comme lecteur, et je lui adresse d'ici tous mes éloges) nous dit, entre autres choses, que pour lui un livre offert amène mystérieusement un autre lecteur qui se tient dans l'ombre : la voix, les gestes, le ton, le regard de celui qui a offert ce livre. Cela me conduit à penser, comme préfacier de la première page absente, combien j'aurais aimé être celui qui eût offert ce livre au lecteur qui est en train en ce moment d'en lire la préface. Je le lui aurais offert en connaissant le charme de ces pages d'éloges et par conséquent assuré qu'avec le temps je serais devenu pour lui - comme il est juste, par ailleurs, que tel soit le sort de tout préfacier discret - un lecteur dans l'ombre. Offrir ou préfacer un livre revient à le recommander. Puisque j'arrive trop tard pour l'offrir au lecteur qui est en train de le lire, je le recommande. Il y trouvera nombre des qualités de Manguel écrivain. L'une d'elles est, pour moi, sa conception de l'essai : son idée que l'essai doit signifier de nouveau se risquer à penser différemment, s'aventurer dans des textes où il y a place pour le doute, le commentaire et la nuance narrative qui permettent d'introduire l'essai dans le champ de la fiction.
Le livre des éloges se meut entre la fiction et l'essai, et doit probablement son heureux titre à un livre de poèmes que, sous le même intitulé, publia en 1908 un écrivain argentin très curieux, Enrique Banchs, auteur de quatre ou cinq livres de poèmes qui étonnèrent Borges, lequel en fit grand éloge, surtout La Urna (L'Urne), un livre presque parfait, qui fut publié en 1911 et mérita l'attention enthousiaste de Borges, qui ignorait à ce moment-là que son auteur, malgré ou peut-être à cause de ces éloges, resterait plus de cinquante ans sans rien écrire d'autre.
J'aime beaucoup l'écriture de Manguel car il n'est pas de ces écrivains qui, dans leurs essais, empruntent la ligne droite parce qu'ils savent où ils vont, mais parce qu'il appartient à cette famille d'essayistes qui prennent les textes comme si c'étaient des promenades erratiques où l'auteur s'égare et ne sait où aller, si du moins il a l'intention d'aller quelque part. Il incite le lecteur à explorer sa propre pensée. Il est vrai que Manguel exige du lecteur un réel effort d'imagination. Celui qui le lit de façon purement passive, éduquée et modelée par la tradition, celle par exemple du roman du XIXe, est perdu avec Manguel et peut difficilement devenir son lecteur idéal. Ne sera pas non plus un lecteur idéal celui qui, fuyant la déception de sa propre existence, recherche un monde de substitution. Seul le lecteur qui, quel qu'en soit le motif, ira lui-même à la recherche d'un regard distinct de la réalité conduisant à une vérité (même indéfinie) saura apprécier cet art de Manguel qui abstrait et laisse intact l'essentiel, renouvelle l'essai et transmet le plaisir originel du premier lecteur qu'eut le monde, celui qui commença à lire à la page deux.
Eloge d'Alberto Manguel
par Enrique Vila-Matas
Source: www.fnac.com
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