Les Lucioles en folie | |
Paris-Théâtre national de Chaillot jusqu’au 24 octobre 2009 | |
AprèsLa Estupidez voici La Paranoïa, un autre volet de l’heptalogie écrite par l’Argentin Rafael Spregelburd, inspirée des sept péchés capitaux de Jérôme Bosch, aussi mis en scène par le tandem de choc Marcial di Fonzo Bo et Elise Vigier de la compagnie du Théâtre des Lucioles. On passe de la comédie de mœurs à l’aventure de science-fiction mais sur un mode toujours aussi déjanté. Nous sommes en l’an 20 000 et quelques, le monde est dominé par des extra-terrestres appelés « les intelligences » qui réclament comme nourriture, non pas des kilos de viande fraîche mais de la fiction. Une équipe, constituée d’un écrivain à succès, un astronaute shooté, un mathématicien obsessionnel, un robot transsexuel vieille génération qui se reprogramme toutes les quatre secondes, a été convoquée en secret à Piriapolis pour sauver l’humanité en péril. Après de multiples péripéties plus ou moins claires, on finit par se rendre compte que tous ne sont que les personnages d’une histoire née dans la tête d’une jeune femme passablement givrée, rendue folle et monstrueuse par des quantités d’opérations de chirurgie esthétique qui lui ont été imposées pour accéder au titre de Miss Vénézuela. Spregelburd s’amuse à brouiller et détourner les codes de la série B à la telenovela en passant par les films gores, le fantastique façon Matrix. L’univers de l’Argentin pourrait évoquer Borgès et surtout le livre d’Adolfo Bioy Casarès, L’Invention de Morel dans lequel un homme se prend au piège d’images virtuelles, mais il n’en a pas la rigueur d’écriture. Le dispositif scénique très spectaculaire joue simultanément sur le mode théâtral et cinématographique. Les images filmées en direct sont projetées sur un gigantesque cylindre qui est aussi un élément du décor. Les acteurs (Frédéric Loliée en auteure de bestseller et Pierre Maillet en vieux robot transsexuel déglingué sont particulièrement épatants) se dépensent sans compter et réussissent à faire exister des personnages très improbables dans cette histoire folle qui avance à cent à l’heure, au risque de nous perdre. Le spectacle, d’abord très drôle, peu à peu perd le sens au profit d’une profusion étourdissante de signes et finit par s’exténuer dans son propre vertige, absorbé dans un trou noir intersidéral. Et le spectateur reste proprement sidéré, avec l’intuition qu’il y avait là une belle matière théâtrale. Pourtant, on aimait bien l’idée que seule la fiction puisse sauver l’humanité. La Paranoïa de Rafael Spregelburd, mise en scène Marcial Di Fonzo Bo et Elise Vigier, avec Marcial di Fonzo Bo, Frédéric Loliée, Pierre Maillet, Clément Sibony, Rodolfo de Souza, Elise Vigier, Julien Villa. Au théâtre national de Chaillot, du mardi au samedi à 20h30, dimanche 15h30. Tel : 01 53 65 30 00. Durée : 2h20. |
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