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Fauna

Par larouge • Paula Romina • Dimanche 13/04/2014 • 0 commentaires  • Lu 1183 fois • Version imprimable

 

Fauna : Suivi de Le temps tout entier et Ne serait-ce qu'un peu de bruit

Romina Paula , Christilla Vasserot 
  • Broché: 208 pages
  • Editeur : Les Solitaires Intempestifs (4 décembre 2013)
  • Elle était recouverte de sacs-poubelle pour se protéger de la pluie, on voyait juste son visage dépasser du plastique noir, et puis ces yeux, tellement brillants, pendant une seconde, elle m'a regardée, je ne peux pas vous expliquer ce que j'ai ressenti, ça m'a fait un choc, je ne savais pas d'où venait cette terreur, si j'étais menacée moi, par cette présence, mais ce n'était pas que de la terreur, il y avait autre chose, c'était de l'ordre du plaisir, de l'idolâtrie peut-être. Ça n'a duré qu'une seconde, elle a donné un coup de talon, le cheval a henni et l'apparition est repartie au galop par le chemin de terre.

    Romina Paula écrit, met en scène et joue avec sa compagnie El Silencio, basée à Buenos Aires. Fauna, Le Temps tout entier et Ne serait-ce qu'un peu de bruit sont le résultat de son exploration de l'espace intime et de la famille.
  •  
Extrait:

I. TODESERFAHRUNG
L'EXPÉRIENCE DE LA MORT

ACTRICE.
Nous ne savons rien de ce départ qui ne partage rien 
Avec nous. Nous ne devons ni haine 
Ni admiration, ni amour à cette mort, rien 
Qu'une bouche de masque tragique

Étrangement déformé. Le monde est rempli encore 
De rôles que nous jouons. 
Tant qu'il nous importe de plaire, la mort 
Jouera aussi son jeu même s'il ne plaît point.

Pourtant comme tu marchais, un rayon de réalité 
Pénétra sur la scène, à travers cette faille 
Par où tu t'en allais : vert d'un vert vrai, 
Du vrai soleil, une vraie forêt.

Nous continuons de jouer. Récitant, inquiets, 
Des choses apprises avec peine, 
Cueillant des visages d'ici, de là ; mais ta présence 
Si lointaine, arrachée à notre rôle

Peut nous surprendre parfois, comme une connaissance
Qui sombre vers nous de cette réalité
Au point qu'un instant, emportés par l'élan
Nous jouons la vie, sans penser aux applaudissements.

RÉALISATEUR. - C'était quoi ?

MARIA LUISA. - C'est Rilke. «L'expérience de la mort».

RÉALISATEUR. - Je ne crois pas que ça fasse l'affaire, je trouve ça trop prétentieux.

MARIA LUISA. - Prétentieux ? Ça n'a rien de prétentieux. Je trouve ça tout simplement sublime.

RÉALISATEUR. - Je dis pas que c'est pas beau, je dis que ça ne fait pas l'affaire.

MARIA LUISA. - Fauna lisait beaucoup Rilke.

RÉALISATEUR. - Oui, mais peu importe. Je veux pas dire que c'est pas important, mais l'essentiel n'est pas là, c'est ça, ce que je veux dire. Tel quel, ça fait prétentieux, et en plus, elle récite mal.

MARIA LUISA. - Moi, j'ai trouvé ça sublime. Et parfaitement crédible.

RÉALISATEUR. - Oui, mais ça parle de théâtre, ça devient autoréférentiel, autoconscient.

MARIA LUISA. - De théâtre ? Où ça ?

ACTRICE. - «Un rayon de réalité pénétra sur la scène...»

RÉALISATEUR. - Voilà, c'est là.


 

 

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