Les Livres de la jungle font partie du petit nombre de ces histoires que nous paraissons tous avoir connues avant de les avoir lues nous-mêmes. Que l’on nous en ait fait la lecture dans la version originale en deux volumes, ou que nous les ayons découvertes dans une édition abrégée qui ne propose des contes qu’un choix réduit ; que nous les ayons vues se dérouler sur un écran dans le style familier de Disney ou dans la version “réaliste” de 1995 (tombée dans un oubli bien mérité), depuis plus de cent ans que Rudyard Kipling a publié, en 1894, le premier des Livres de la jungle, les aventures d’un petit Indien nommé Mowgli, élevé par une famille de loups, ont pris place dans notre imaginaire.
Mais de Rudyard Kipling, que savons-nous ? L’homme qui a inventé ces histoires a vécu une vie longue et difficile, en dépit du fait qu’il fut très tôt dans sa carrière salué comme l’un des plus grands écrivains du monde. C’était un homme très discret qui détestait les questions des journalistes et des critiques et qui refusa toujours les distinctions honorifiques car il souhaitait n’être connu qu’en tant qu’écrivain. Vers la fin de sa vie, il écrivit une très curieuse autobiographie intitulée, avec beaucoup de justesse, Something of Myself (Quelque chose de moi-même) – “quelque chose” parce que, loin d’être tout sur lui, ce n’était qu’un aperçu de certains détails de son existence qu’il acceptait de faire connaître à son public. Il disait avoir écrit ce livre “pour mes amis connus et inconnus”, et, ces amis, il en avait des millions : des lecteurs dans le monde entier dont Mowgli et les autres habitants de la jungle – la sage panthère Bagheera, le débonnaire ours Baloo et Shere Khan, le tigre redoutable – hantaient les rêves et les souvenirs personnels.
Donc, comme le dit un jour Kipling à qui l’on demandait quelle est la meilleure façon de raconter une histoire : “Commençons par le commencement.”
I
Enfance
Bonheur et désolation
Rudyard Kipling est né en Inde, à Bombay, le 30 décembre 1865. Selon l’une de ses tantes, il devait son prénom inhabituel au fait que ses parents avaient fait connaissance à l’occasion d’un pique-nique au lac Rudyard, en Angleterre, mais Kipling contestait cette explication.
Ses parents avaient quitté l’Angleterre depuis peu pour s’installer en Inde. Sa mère s’adaptait difficilement aux coutumes locales et au climat chaud et humide, et elle faillit mourir en couches. Plus tard, Kipling racontait volontiers qu’afin d’aider Mrs Kipling dans cette épreuve l’un des serviteurs hindous se précipita dans la cour pour y sacrifier un chevreau à la déesse Kâlî. Toute sa vie durant, Kipling devait éprouver de la reconnaissance envers les dieux indiens sous les cieux desquels il était né et qui l’avaient aidé à survivre.
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