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Argent Brûlé: nouvelle traduction

Par larouge • Piglia Ricardo • Mardi 23/02/2010 • 0 commentaires  • Lu 1660 fois • Version imprimable

Argent brûlé
Traduit de l’espagnol (Argentine) par François-Michel Durazzo
Nouvelle traduction






Entre septembre et novembre 1965, Buenos Aires et Montevideo sont le théâtre d’un spectaculaire braquage de banque. Ce fait divers défraye alors la chronique...

« Mon premier lien avec l'histoire que ce livre raconte (comme c'est le cas chaque fois que les événements ne sont pas de la fiction) est le fruit du hasard. Un soir de mars ou d'avril 1966, dans un train qui allait vers la Bolivie, je fis la connaissance de Blanca Galeano que les journaux appelaient "la concubine" du voyou nommé Mereles. Elle avait seize ans mais avait l'air d'une femme de trente ans et elle fuyait. Elle me raconta une histoire très étrange que je crus à moitié (...) Durant les longues heures de ce voyage qui dura deux jours, elle me raconta qu'elle venait de sortir de prison, qu'elle avait fait six mois pour association de malfaiteurs avec les voleurs de la banque de San Fernando et qu'elle s'exilait à La Paz. (...)
– Il y avait environ trois cents flics et eux, ils ont tenu bon enfermés là et personne n’a pu les en sortir, disait la Petite avec des mots prononcés sur un ton hostile, comme le sont souvent les mots dont on se sert pour raconter une défaite. (…) Elle me parla des Jumeaux, de Bébé Brignone, du Gaucho Dorda, de Malito et de Bazán le Bancal. Et moi je l’écoutai comme si je m’étais trouvé en présence de la version argentine d’une tragédie grecque. »
Ricardo Piglia

À la manière d’un Truman Capote ou d’un William Faulkner, Piglia renouvelle ici de manière magistrale le roman noir argentin.


NOTE DU TRADUCTEUR

Argent brûlé n’est pas un roman, mais le récit d’un fait divers qui défraya la chronique, sur fond d’agitation péroniste et de magouilles politiques. La violence des faits, la puissance des sentiments, la brutalité de la police dépassent parfois la fiction et tous les ingrédients d’une tragédie moderne étaient réunis. Ricardo Piglia aurait pu être tenté de réécrire l’histoire, d’en faire un roman basé sur la réalité. Il a préféré rester fidèle aux faits, à l’enquête, quitte à superposer parfois les différentes versions que lui offraient ses sources et à donner au texte le caractère d’une mosaïque, en mettant entre parenthèses les incises qui laissent à chaque témoin la responsabilité de sa parole. La longue enquête de l’auteur et l’accès à des documents confidentiels de source judiciaire, à la transcription des écoutes policières, à divers témoignages, ainsi qu’aux coupures de presse qui couvrirent l’événement, impriment leur marque au récit et renouvellent de manière magistrale le roman noir argentin. Le récit progresse, par petites touches, à mesure que chacun des témoignages apporte un fait nouveau ou corrobore un détail. Le narrateur, démultiplié par les témoins qu’il cite, circonscrit peu à peu la réalité humaine qui donne de la cohérence et de l’épaisseur aux portraits. Sans ces matériaux Malito, Bébé Brignone, Gaucho Dorda et Mereles le Corbeau sembleraient presque irréels. Cependant, loin de s’en tenir à la chronique policière, Ricardo Piglia ponctue le récit d’incursions dans le passé de ses personnages, sans tomber dans le travers de la digression. L’intensité de l’expérience ou la proximité de la mort font souvent ressurgir le passé. Chaque personnage est alors confronté à ses propres fantômes. L’évocation par Brignone de l’univers carcéral, de son oncle Federico, celle de la petite Slave qui vient hanter Gaucho Dorda sont autant de moments poignants qui nuancent le portrait des voyous en les rendant humains. Dans ces moments-là Piglia excelle. Comme dans Respiration artificielle ou la Ville absente, les micro-récits donnent une respiration et un ton unique à la narration. Tout en refusant de s’enfermer dans une seule forme d’écriture – Argent brûlé est son premier thriller –, l’auteur a su rester fidèle aux faits évoqués et fidèle à lui-même. Son double Emilio Renzi, la figure de l’enquêteur présente aussi dans les précédents romans, en est la preuve.

F.-M. D.






Deux villes, Buenos Aires et Montevideo, sont le théâtre d’un braquage de banque entre septembre et novembre 1965. Ce fait divers défraye alors la chronique en Argentine, sur fond d’agitation péroniste et de magouilles politiques. La violence des faits, la puissance des sentiments, la brutalité de la police dépassent de loin la fiction. Quand il décide d’en faire un récit, Ricardo Piglia s’en tient aux faits, à l’enquête, aux différentes versions de ses sources ; judiciaires, policières, journalistiques…
Grâce à une subtile et efficace progression, par des incursions dans le passé des personnages, Malito, Brignone, Dorda et Mereles le Corbeau prennent vie avec un réalisme extraordinaire. L’évocation par Brignone de l’univers carcéral, de son oncle Federico, celle de la petite Slave qui hante Dorda sont autant de moments poignants qui rendent humains les voyous. De même, la force qui émane du couple Bébé et Gaucho irradie le texte d’une sensuelle beauté. L’intensité de l’expérience, la proximité de la mort les confrontent tous à leurs propres fantômes. Dans ces moments-là Piglia excelle. Il sait donner une harmonie, un rythme et un ton uniques à la narration. En refusant de s’enfermer dans une seule forme d’écriture, il reste fidèle aux faits et à lui-même.


source: www.zulma.fr/livre-argent-brule-555.html


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