Alors que le roman rappelle certaines anecdotes sur les morts précoces de Mantegna ou du disciple de Giotto, le roman ici figure un jeu de doubles-messieurs : Francesco Monterga et son apprenti Piero della Chiesa contre les deux frères Greg et Dirk Van Mander, un match de champions rivaux distribuant dans le haut tableau. Quoique de jeux différents, ils sont à égalité aux yeux des connaisseurs de l’époque : ces deux tandems sont les meilleurs du moment, et le roman livre l’anecdote de quelques coups bas entre eux. Entre-temps, le suspect Hubert van des Hans, puis la ravissante Fatima Guimaraes, ramassent les tirs perdus, et les leur redonnent pour qu’ils rejouent… Parallèlement, l’intrigue file sur les mystères des pigments, et des liants : l’oleum pretiosum notamment. A cet égard, on trouve de belles descriptions sur les arcanes du métier : développements sur quelques techniques de peinture et difficultés pour obtenir des couleurs qui soient à la fois éclatantes et pérennes. Juan Díaz de Zorrilla, un obscur Espagnol installé en Italie, fait les meilleurs pigments, selon des recettes connues de lui seul. Mais il ne sait rien de cette huile précieuse, dont le secret est dans l’exemplaire unique du manuscrit Diversum artium schedula, rédigé au IXe siècle par le moine Eraclius. Propriété autrefois de Cosimo de Verona, il est aujourd’hui sous coffre et sous clé chez son ancien disciple Francesco Monterga. Plus exactement, ledit secret est dans un passage sybillin, le Secretus coloris in status puris ( secret mythique de la couleur à l’état pur ) dans le dernier chapitre intitulé Coloribus et artibus. Mais voilà quinze ans que Francesco ne parvient pas à en percer le secret. Le document n’en suscite pas moins des convoitises : on l’espionne, lui, Monterga. Et Piero, son cher apprenti sur qui reposent tous ses espoirs, est retrouvé mort et défiguré presque au début du roman…Un Roman original ? Sur le plan littéraire, le roman est bien écrit et offre de bons croquis de caractères : les personnages sont bien identifiés et leurs comportement cohérents de bout en bout. Et il y a plus de manipulations qu’on ne croit. Dit autrement, le roman est agréable et intéressant, et la résolution de l’énigme bien menée. En revanche, le lieu qu’elle décrit est un peu facile et enlève donc à l’intrigue beaucoup de son charme. En outre, comme rien n’est gratuit, ce secret a un prix. Très élevé… Soit, mais la nature de ce prix, ou sa cause plus exactement ( comprendront ceux qui liront jusqu’au bout ), est singulièrement ésotérique. Ah la la, tout ça pour ça…Et puis, malgré la qualité de la plume, il y a quelques facilités, comme ici : « Greg Van Mander était si adroit qu’il donnait l’impression de pouvoir travailler les yeux fermés, ce qu’il faisait au demeurant car il avait été frappé de cécité (p.71) ». Cela, en français parlé, s’appelle du suspense à deux balles. Pire, le roman a parfois tendance à rallonger la sauce et à se répéter : ce n’est que vers le tiers final du livre que surviennent enfin de nouveaux faits et que les événements accélèrent, en contraste frappant avec les deux premiers tiers où la narration est essentiellement descriptive et explicative. Agréable encore une fois, mais avec des redites.Enfin, relativisons l’assertion superlative de la quatrième de couverture : « roman policier très original ». L’auteur argentin n’a que repris le filon du polar historique qui a si bien réussi à Arturo Pérez Reverte, qu’il a certainement lu. [….]
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