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à propos de "Et balancez mes cendres sur Mickey "

Par larouge • Garcia Rodrigo • Vendredi 26/06/2009 • 0 commentaires  • Lu 585 fois • Version imprimable

Rodrigo Garcia, violence et beauté
Article paru dans l'édition du 11.11.07
« Et balancez mes cendres sur Mickey », un spectacle marquant de l'Hispano-Argentin, au Rond-Point

L'ambiance était électrique, jeudi 8 novembre, au Théâtre du Rond-Point, pour la première de Et balancez mes cendres sur Mickey, de Rodrigo Garcia, présentée dans le cadre du Festival d'automne. Chacun se demandait comment allait se dérouler la scène où l'on rase les cheveux d'une femme - scène dont l'idée même a suscité une large polémique, certains la jugeant inadmissible parce que associée aux femmes tondues à la Libération ( Le Monde du 8 novembre).
S'est ajouté le fait que les places n'étaient pas numérotées. Sitôt les portes ouvertes, les gens se sont bousculés à l'intérieur de la salle avec une indélicatesse toute parisienne. Puis certains spectateurs ont pris le parti de rire, d'un rire mondain pénible, dès les premiers mots. Bref, c'était mal engagé.
Une heure vingt plus tard, les mêmes quittaient la salle après avoir applaudi, certains s'attardant, comme s'ils avaient du mal à se défaire de ce qu'ils avaient vu : un spectacle marquant, qui vous met le corps et l'âme à l'envers, comme il se doit quand le théâtre n'est pas une faribole.
A sa création, au Théâtre national de Bretagne, à Rennes, en novembre 2006, le spectacle s'appelait Et dispersez mes cendres à Euro Disney. Menacé d'un procès par le parc de loisirs de Seine-et- Marne, Rodrigo Garcia a dû changer le titre. Ce n'est pas la première fois que l'Hispano-Argentin cite une marque. Il y a déjà eu L'Histoire de Ronald, le clown de McDonald's et J'ai acheté une pelle chez Ikea pour creuser ma tombe.
UN PROPOS RADICAL
Tous les titres de Garcia sont des manifestes. Ses spectacles aussi, qui attaquent de front la société de consommation en tablant sur une esthétique trash et un propos radical, au risque de verser dans le Grand-Guignol. Cela ne vaut pas pour Mickey, le meilleur spectacle de Garcia à ce jour.
S'il n'y a pas eu polémique, le soir de la première, c'est parce que la tonte des cheveux d'une jeune femme s'est glissée - comme les corps nus enduits de miel, les hamsters péchés dans un aquarium, les grenouilles du Togo accrochées à des ficelles... - dans un acte proche de la performance, où la force des actions se conjugue à celle des images et du texte.
C'est cela que les détracteurs de Garcia oublient : l'homme est auteur au même titre que metteur en scène. On ne peut dissocier les deux engagements, que la scène traduit avec, par moments, un désespoir proche de celui de Sarah Kane, et parfois avec une ironie à la Michel Houellebecq.
Il faut lire Garcia (le texte est édité aux Solitaires intempestifs, 94 p., 12 €) comme il faut voir Mickey - miroir de l'ennui proprement mortel qui guette chacun au coin de la rue d'aujourd'hui, pour peu qu'il ouvre les yeux.
Dans tous les fils qu'il tisse, au propre et au figuré, la violence et la beauté sont unies. C'est dur, mais il n'y a pas de méchanceté dans le regard de Rodrigo Garcia. Au contraire : il s'en dégage une tendresse sans pitié qui fait mal. Oui, une tendresse.
Brigitte Salino

Source: www.lemonde.fr

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