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à propos de "Chez Borges" (2)

Par larouge • Manguel Alberto • Dimanche 05/07/2009 • 0 commentaires  • Lu 665 fois • Version imprimable

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21 août 2003
Chez Borges
Le passage du flambeau Tristan Malavoy-Racine
Quand on a bouffé du livre toute sa vie, on n'arrête pas du jour au lendemain. Jorge Luis Borges, qui avalait chaque année des pans de bibliothèque entiers, n'allait pas rompre avec ses chers bouquins parce que ses vieux yeux l'abandonnaient. Au soir de sa vie, le grand auteur argentin engageait donc des lecteurs, parmi lesquels un certain Alberto Manguel, étudiant à l'université de Buenos Aires. Une rencontre déterminante, quand on sait l'importance qu'a prise la lecture pour le Canadien d'adoption, auteur de titres éblouissants, dont Dictionnaire des lieux imaginaires et surtout Une histoire de la lecture.
Avec Chez Borges, petit livre exquis, Manguel faire revivre l'homme et l'oeuvre, l'une des principales de la littérature hispanophone. À travers les souvenirs de ces séances, entrecoupés d'une foule d'anecdotes, on découvre le quotidien de vieux garçon de Borges, dans cet appartement qu'il partage encore avec sa mère, à bientôt 70 ans! On entrevoit les livres, dans tous les coins et recoins, parmi lesquels Borges nourrissait sa culture encyclopédique et développait ses propres travaux, qu'il orchestrait désormais mentalement. "Il se souvenait de tout [...]. Il était capable de réciter, de corriger et de modifier dans sa mémoire tous ses propres écrits, à la stupéfaction et au ravissement de ses auditeurs."
Dans ce salon feutré, hors du monde et du temps, on assiste à la lecture appliquée de Verlaine, Kipling, Stevenson ou Góngora, puis aux longues discussions avec les amis de passage, dont Adolfo Bioy Casares et Silvina Ocampo. On devient témoin privilégié de la place accordée en Amérique latine aux lettres et à l'esprit. "Dans d'autres sociétés, parler de métaphysique devant une tasse de café peut sembler prétentieux ou absurde; pas en Argentine", écrit Manguel.
Bien qu'inspiré par une estime et une amitié encore intactes aujourd'hui, le lecteur devenu grand mène son projet sans la complaisance qui teinte la plupart des hommages. Par exemple, Manguel se moque volontiers des "exclusions littéraires" de l'intransigeant Borges, c'est-à-dire les auteurs que ce dernier condamnait parfois sans grand procès, dont Goethe, Stendhal et Tolstoï. Tout l'intérêt du portrait est là, dans cette approche pleine de sens critique et de liberté. De modestie, aussi. "Ce ne sont pas là des souvenirs; ce sont des souvenirs de souvenirs de souvenirs, et les événements qui les ont suscités ont disparu, ne laissant que quelques images, quelques mots, et même ceux-là, je ne suis pas certain qu'ils étaient tels que je me les rappelle."
Mais la vérité des détails importe peu. Manguel touche à la vérité profonde de l'auteur Borges, à son légendaire appétit littéraire et au pourquoi de ses méthodes. Ce faisant, il nous en dit long sur l'essayiste brillant et le conteur fabuleux qu'il est lui-même devenu, et que Borges couve sans doute d'un oeil rempli de fierté d
epuis son paradis en forme de bibliothèque.
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