Le roman de Martin Felipe Castagnet aux éditions de la MEET
De corps en corps
• 12 février 2013 •
Comme ses contemporains, au moment de mourir, Ramiro Olivares a eu le choix. Après l’état dit «de flottement» qui maintient l’activité cérébrale au sein d’un modèle informatique et permet de préserver les «entités individuelles», certains continuent de flotter sur internet (on peut facilement communiquer avec eux), d’autres conservent leurs corps originel (ils sont considérés comme malades), d’autres encore refusent la procédure (ceux-là n’entrent même pas dans les statistiques). Mais la plupart des morts préfèrent migrer vers un nouveau support ; on appelle cette opération «brûler» un corps. Ramiro, un des premiers de sa génération, l’a fait : il avait encore un certain nombre de choses à régler sur Terre. C’est ainsi qu’au début du récit, le narrateur se retrouve dans le corps rebondi d’une femme (ce ne sera d’ailleurs pas sa dernière migration). Ramiro/Rama cohabite donc désormais avec ses petits-enfants, dont il devient le confident ; son fils Théo, bien plus âgé que lui et sénile, le prend pour sa grand-mère ; il dialogue souvent avec Véra, sa fille morte restée en flottement… On l’aura compris, Les corps de l’été, du jeune Argentin Martin Felipe Castagnet, est un roman d’anticipation. Composé de douze chapitres courts, eux-mêmes subdivisés en paragraphes numérotés, comme autant d’éléments d’un puzzle que le lecteur recompose au fil du texte, le récit est rapide, quasi factuel, ce qui en accentue le caractère fantastique. Cette fiction un brin délirante interroge avec pertinence la condition humaine actuelle -c’est le rôle de toute bonne littérature d’anticipation-, et en particulier les notions de genre et de famille. Pour ce bref roman qui secoue énergiquement le cocotier généalogique et met la mort au tapis, l’auteur a reçu le Prix de la Jeune Littérature Latino-américaine 2012. La présente édition, bilingue, permet de le lire en VO.
FRED ROBERT
Février 2013
Les corps de l’été
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